Point sur l’offensive russe 🇷🇺 du Sud-Donetsk.
Après plusieurs semaines de progression constante et non contrôlée, l’armée ukrainienne a engagé des renforts permettant de tenir les ligne de défenses. La situation est plus volatile autour de Voulhedar.
Dans la direction de la ville de Pokrovsk, la 93ème brigade mécanisée est arrivée en renforts pour tenir la ligne à Novohrodivka.
Le génie ukrainien s’atèle à renforcer les défenses, les soldats prennent place dans les tranchées préparées.
Dans cette direction, nous avons assisté à un ralentissement de l’offensive russe. La logistique de cette lourde armée doit suivre après une progression de 10km en 3 semaines.
Rappelons que la route principale (Ocheretyne) n’est pas très éloignée du front.
Dans la direction de Selydove, la 15ème brigade « Kara » est venue renforcer les éléments présents dans la ville pour empêcher une progression russe vers Andriivka.
L’armée russe a subie les premières pertes depuis longtemps dans la zone.
Il semblerait que les ukrainiens apposent une résistance ferme pour la première fois depuis des semaines à l’entrée est de Selydove.
Autour du pont ferroviaire, plusieurs blindés russes ont été perdu, dont un char capturé. Rappelons que l’armée russe n’avait pas utilisé des blindés depuis plusieurs semaines dans cette direction. On détecte leur présence quand il faut donner un appui feu ou approcher l’infanterie au plus près, ce qui se vérifie dans le renforcement actuel du dispositif ukrainien.
Dans la direction sud, là ou l’armée ukrainienne devra tôt ou tard retirer ses troupes, l’armée russe a réalisé de petites progressions vers Oukrainsk et Hrynk. Je pense cependant que les combats pour ces villes pourraient être à l’avantage de l’Ukraine.
Après la prise surprise de Novohrodivka, dans la continuation logique du rail (comme depuis mars dernier), beaucoup ont fantasmé sur un effondrement du front sud-est. J’ai toujours défendu l’idée du recul progressif :
Il est vrai que l’armée ukrainienne se trouva dans une situation critique qui menaçait plusieurs villes et des pans entier du front.
Elle ne s’est toujours pas sorti de cette situation et le risque persiste pour Selydove notamment.
Depuis Prohres et Zhelanne, le recul ukrainien n’était pas sous contrôle. La perte de Novohrodivka quasiment intacte en était la preuve.
La direction de Pokrovsk est plus solide et les combats qui vont s’y dérouler promettent d’être sanglant, à l’image de Bakhmout.
Soyons clair, l’armée ukrainienne n’a aucun intérêt à perdre le contrôle de la route Pokrovsk-Kostiantynivka.
Mais pour contenir la puissante force russe, il lui faut établir des lignes solides ou les divisions russes viendraient fracasser le peu de blindés leur restant.
Le combat urbain bénéficie à l’armée ukrainienne lorsqu’elle est nombreuse. Je pense à Toretsk et le district Kanal de Tchasiv Yar.
Mais l’armée russe bénéficie du nombre pour submerger les villes. Il faut donc suffisamment d’hommes pour infliger des pertes à l’adversaire.
Dans l’offensive russe, je pense qu’il y avait 3 plans possibles :
1-Le plus ambitieux (prendre Selydove et foncer sur l’arrière de Kourakhove tout en attaquant Pokrovsk)
2-Attaquer Kourakhove par le nord
3-Attaquer Pokrovsk
Le plan n°1 aurait fonctionné avec une chute rapide de Selydove. Cela semble +/- compromis à court terme.
Le plan n°2 est toujours en cours, l’armée russe avance sur les 3 villes (Oukrainsk, Hrynk et Kourakhivka).
Mais ces 3 ensembles urbains fonctionnent ensemble. L’armée russe doit avancer à l’ouest de la rivière Vovcha, sur les hauteurs pour s’éviter la tâche d’attaquer les défenses sur ces mêmes hauteurs.
Oukrainsk est un bastion nécessaire pour poursuivre l’offensive au sud.
J’ai l’impression pour l’instant que l’armée russe a plutôt activé l’objectif minimaliste, en attaque à l’est de la rivière, pour forcer un retrait ukrainien.
Et le plan n°3 est de s’enfoncer dans les combats pour Pokrovsk, pour montrer une grande victoire à Noël à Moscou et s’en servir de base pour les futures offensives.
Je répète, Kourakhove est une ville cruciale, probablmeent l’objectif russe de cette offensive.
Et c’est là que nous arrivons sur le fameux château fort du XXIème siècle : Vouhledar.
La petite ville est dans une situation assez compliquée depuis que l’armée russe est entrée dans la mine à l’est et s’approche de Vodyane au nord-est.
Au sud-est du village, sur le front « sud » de l’Ukraine, l’armée russe s’est emparée du village de Prechystivka, au prix de nombreuses pertes.
Cette zone du sud-donetsk est vulnérable, la prise de Prechystivka menace Velika Novosilka par l’est. Cette petite ville est importante, c’est un point d’arrêt au milieu de la campagne entre oblasts de Donetsk et Zaporizhia.
S’attaquer à la ville et mettre un terme au terrain bien défendu et miné qui a été libéré lors de la contre offensive de 2023 est un objectif haletant.
Mais encore plus haletant est la possibilité de progresser vers le nord, sous couvert de la rivière Mokri Yali. A contrario de Pokrovsk, je ne vois pas de grands mouvements coordonnés dans le sud-donetsk.
L’offensive de Vouhledar en février 2023 reste dans les esprits russes comme l’un des pires échec de la guerre, l’offensive actuelle vient donc de l’est.
La pression aérienne reste la même sur le front sud-est. C’est un atout prioritaire de l’armée russe qui espère bientôt pouvoir faire pleuvoir ces bombes sur Pokrovsk et Kourakhove de manière quotidienne.
Depuis juillet, nous avons assisté à la première progression libre dans le Donbass de la guerre. Je parle par là de 13km sans résistance accrue et en limitant les pertes.
J’exclue volontairement ce qui est au nord de la rivière Siverski Donets (Lyman, 2022).
Conclusion :
-L’offensive russe n’est pas terminée mais elle n’a pas exploité entièrement les brèches, probablement pour plusieurs raisons : prudence, manque de moyens, logistique ne suivant pas, renforts ukrainiens.
-Pokrovsk et Kourakhove ne sont pas perdu, loin de là. L’armée ukrainienne a aussi montré à Koursk que son potentiel offensif existe toujours.
-Les frappes en profondeurs des deux camps prouvent leur efficacité (raffineries russes, bases ukrainiennes). Il est indispensable pour l’Ukraine de développer ses propres moyens face au réticences germano-américaines.
-Les innovations en tous genre font leur apparition : drones ‘lances flames’, drones ‘défense aérienne’, cavalerie moderne (motos)… (2ème image via @OSINTua)
Clément Molin