Quelles sont les preuves de l’aide et de la présence de l’armée rwandaise aux côtés du M23 ?

J’ai parfois lu ici qu’il n’y en a pas ou peu, ce qui est faux. Nous avons des centaines de preuves que je vais évoquer ici, tout en parlant de la structure du M23.

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Déjà, il faut savoir la chronologie, que j’essaie de rappeler à chaque fois :

-1994 : génocide des tutsis et hutus modérés du Rwanda -> fuite de populations au Zaïre
-1997 : 1ère guerre du Congo, plusieurs pays voisins (Rwanda et Ouganda) renversent le régime de Mobutu.
-1998-2003 : 2ème guerre du Congo, les dirigeants installés par rwandais et ougandais se retournent contre eux. (Guerre assymétrique, les deux soutiennent des groupes armés)
-2003-2009 : le RCD (groupe armé tutsi soutenu par le Rwanda durant la 2ème guerre du Congo) disparait, mais ses membres créent en 2005 le CNDP et poursuivent l’insurrection contre les FARDC jusqu’aux accords du 23 mars 2009.
-2012-2013 : Les anciens membres du CNDP reprennent la rébellion et la nomment M23, ils prennent Goma avant d’être défaits et de fuir au Rwanda et en Ouganda.
-2021-2025 : Le M23 (reformé en 2017) reprend son insurrection avec l’aide de la RDF et capture de vastes pans du Nord-Kivu.

Le M23 est un groupe armé a dominance Tutsie et principalement composé de congolais Tutsis. Le groupe a été renforcé par des tutsis étrangers depuis 2021.

Il a deux objectifs :
-Combattre les FDLR (rebelles Hutus, fils des génocidaires qui espèrent « libérer » le Rwanda)
-Défendre les intérêts des Tutsis de RDC, donc du Rwanda. Cela passe par la protection des tutsis de RDC et le soutien à la politique rwandaise en RDC.

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D’où vient la branche actuelle du M23 ?

En 2012, le groupe s’est scindé en deux, la branche Ntaganda-Runiga (militaire/politique) a été défaite et est désormais en Ouganda, sous le nom d’ASP/M23.

La branche principale Makenga-Bisimwa vient du Rwanda et porte le nom ARC/M23.

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En 2017, Sultani Makenga, chef militaire du M23 actuel s’est positionné au tripoint frontalier Rwanda-Ouganda-RDC dans le Parc des Virunga. (un drone de la MONSUCO a filmé sa base).

Il se ravitaillait au Rwanda et a entrainé ses troupes, environ 200 hommes.

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Le 29 mars 2022, plus de 400 hommes ont été observés, en colonnes, attaquant la ville frontalière de Bunagana.

Une fois encore, un drone de l’ONU a pu repérer le trajet de cette force, dont une partie provenait du Rwanda. Des images ultérieures ont aussi été publiées.

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À mesure que le M23/ARC intensifiait ses préparatifs en vue d’une nouvelle offensive contre les FARDC, il a renforcé ses campagnes de recrutement à partir de juillet 2022 dans les territoires de Rutshuru, de Masisi, de Walikale et de Lubero, ainsi qu’en Ouganda et au Rwanda.

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Présence sur le terrain de forces spéciales de la RDF (Rwandan Defense Forces) :

Les observateurs étrangers notent que les éléments de la RDF sont souvent présents à proximité des positions du M23, qu’ils participent aux combats contre les FDLR, mais aussi contre les FARD.

D’après ces mêmes observateurs et à partir des vidéos de drones fournies par divers acteurs, il a été possible de repérer le transfert frontalier d’armes et de munitions depuis le Rwanda et parfois la coopération avec les forces Ougandaises de l’UPDF à la frontière.

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Le M23 dispose d’un grand camp d’entrainement dans le village de Tchanzu, où sont formés des centaines de recrues, avec la participation de formateurs rwandais.

Des centaines de recrues y sont régulièrement amenées, de gré ou de force. Certaines sont congolaises, d’autres rwandaises.

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J’ai pu moi-même cartographier des dizaines de positions appartenant au M23 ou aux FARDC, toutes situées sur le haut des collines, celles-ci correspondent avec celles capturées par des drones.

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A chaque offensive du M23, un important nombre de renforts des RDF étaient aperçus.

En deuxième image se trouve l’organigramme du M23, on notera que la majorité des membres ici présents sont nés dans la région de Goma.

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Il est par ailleurs intéressant de noter que les armes et les uniformes en possession dans les effectifs du M23 ne viennent pas tous de la RDC, ils n’ont donc pas pu être capturés.

Certains équipements de pointe sont utilisés par les soldats rwandais.

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Les soldats de la RDF ont par ailleurs été aperçus dans les tranchées aux côtés des membres du M23 et sur les collines, parfois, des compagnies entières étaient présentes.

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Il y a eu, récemment, une utilisation accrue de pick-up pour transporter hommes, armes et munitions, compte tenu de l’éloignement du front de la frontière rwandaise, d’où la RDF entre et d’où le M23 s’approvisionne.

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Sur le territoire sous contrôle du M23, des éléments de défense aérienne de courte portée rwandais ont été aperçus.

Plusieurs drones, dont ceux de la MONSUCO ont déjà été abattus, des Su-25 ont essuyés des tirs, tout comme des hélicoptères de l’ONU.

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Donc : Le M23 est un groupe armé CONGOLAIS, soutenu sur le terrain par la RDF, qui l’arme et le fournit en munitions.

Le M23 se charge du recrutement de Congolais et de porter un projet pour le Congo. Il est assisté par la RDF dans les tâches militaires.

Exemple ici avec un discours d’un général du M23 dans la cité minière de Rubaya l’été dernier, qui mobilise ensuite des volontaires, congolais, qui sont envoyés en formation à Tshanzu.

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Tous les mois, le M23 forme des centaines de recrues, venues du Congo, mais aussi d’autres pays. A chaque fois, sous la supervision d’officiers Rwandais, Ougandais et Congolais (ceux du M23).

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Ainsi, le M23 recrute à tours de bras, en RDC et ailleurs. De nombreux soldats sont formés à être officiers, et le 31 octobre 2024, c’est même 3 000 recrues qui ont terminé la formation !

De plus, le M23 est renforcé par des groupes armés alliés (« Zaïre »).

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Voici, d’après le groupe d’expert des Nations Unies, la formation théorique qui est dispensée aux recrues du M23, venant soit des camps et territoire occupés, soit de pays voisins :

L’histoire du Congo, du M23, utilisation des armes, tactiques, patriotisme, rôle des femmes…

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Concernant la présence des forces spéciales rwandaises, voici ce qu’en dit un ancien membre du M23 :

Les anciennes recrues ont toujours décrit ces soldats comme des forces spéciales rwandaises hautement entraînées et disciplinées qui étaient là pour former et soutenir le M23, et les soldats réguliers du M23 n’étaient pas autorisés à interagir avec eux.

Les soldats de la « force amie » se déplaçaient dans des camions militaires, étaient équipés d’un équipement militaire complet et de haute technologie,
et dirigeaient principalement des opérations militaires spéciales

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Ce système de défense aérienne a été photographié à 6km de Sake. Il est d’origine chinoise et permet au M23/RDF une protection face aux frappes aériennes des FARDC/mercenaires sur leurs positions.

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Les preuves sont suffisamment nombreuses, même vidéos pour pouvoir affirmer que le M23 dispose d’un soutien total de la part de l’armée rwandaise.

Mais il y a ensuite des divergences d’analyses.

Le M23 est chargé de mettre en place une politique, pour, pourquoi pas, avancer plus loin dans le pays. Il recrute énormément, ce qui fait qu’il dispose probablement de plus de 15 000 hommes, les recrues sont probablement principalement issues des régions occupées et des camps de réfugiés au Rwanda et en Ouganda.

Avec la prise de Goma, le M23 va pouvoir recruter massivement dans les camps de réfugiés et dans la ville, notamment si certains wazalendo changent d’allégeance, en fonction de la viabilité du projet qui sera présenté par le mouvement.

De leur côté, les RDF se font discrètes. Elles appuient le M23, lui donnent renseignement et armes. La plupart du temps, ce sont des forces spéciales qui sont déployées, mais pour les principaux assauts, des compagnies de l’armée régulière sont présentes.

Le chiffre de 3 000 à 4 000 rwandais varie probablement, il est fort à parier qu’il est actuellement très élevé. La RDF peut se félicité d’avoir réussi à passer en 4 ans d’un groupe de 200 hommes à plus de 10 à 15 000 hommes, formant tous les mois des centaines de recrues. Désormais, le M23 est d’envergure nationale et l’aide rwandaise lui permet de rivaliser face à une force opposante plus nombreuse.

Clément Molin

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