D’après l’Emissions Gap Report 2024, le temps perdu depuis 2020 pèse lourdement sur les scénarios de réchauffement, plaçant l’objectif de l’Accord de Paris à 1,5°C en situation critique et menaçant le seuil des 2°C.
À l’approche de la COP29 en Azerbaïdjan et la COP30 au Brésil, il est essentiel de réduire les émissions de 42 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2019 pour maintenir la hausse des températures sous 1,5°C. Pour un seuil de 2°C, une réduction de 28 % est nécessaire.
En 2023, les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) ont augmenté de 1,3 % par rapport à 2022, dépassant le taux de croissance moyen observé dans la décennie précédant la pandémie de COVID-19 (2010-2019), qui était de 0,8 % par an. Cette hausse concerne toutes les sources de GES. Le secteur de l’énergie (notamment la production d’électricité) est resté le plus grand contributeur aux émissions mondiales, avec 15,1 GtCO₂e, suivi par les transports (8,4 GtCO₂e), l’agriculture (6,5 GtCO₂e) et l’industrie (6,5 GtCO₂e). De plus, les émissions de l’aviation internationale, qui avaient chuté durant la pandémie, ont connu une forte augmentation de 19,5 % en 2023 par rapport à 2022, atteignant presque les niveaux d’avant COVID-19. D’autres secteurs, tels que les émissions fugitives liées à la production de combustibles, le transport routier et l’industrie énergétique, ont enregistré des hausses supérieures à 2,5 %.
Ces phénomènes s’expliquent par l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre des pays du G20 en 2023, représentant 77 % des émissions mondiales. En incluant les pays de l’Union africaine, le total atteint 82 %. Les six principaux émetteurs à eux seuls génèrent 63 % des émissions, tandis que les pays les moins avancés n’en représentent que 3 %. En effet, des disparités notables subsistent, avec des émissions par habitant aux États-Unis et en Fédération de Russie environ trois fois supérieures à la moyenne mondiale de 6,6 tCO₂e, alors que l’Union africaine, l’Inde et les pays les moins avancés restent en dessus. De plus, parmi les parties à l’Accord de Paris, 90 % ont mis à jour ou remplacé leur contribution déterminée au niveau national initial depuis l’adoption de l’Accord de Paris. Cependant, la plupart de ces améliorations ont eu lieu en préparation de la COP 26 de 2021 et malgré les demandes des trois dernières COP pour renforcer davantage les objectifs de 2030, un seul pays a renforcé son objectif depuis la COP 28. Pire, aujourd’hui, onze pays du G20 sont évalués comme étant sur la mauvaise voie.
Pour contrer cela, au 1er juin 2024, 101 parties représentant 107 pays, couvrant environ 82 % des émissions mondiales de GES, avaient adopté des engagements de neutralité carbone. Tous les membres du G20, à l’exception du Mexique et de l’Union africaine, ont fixé des objectifs de neutralité carbone.
Toutefois, peu de progrès a été réalisé par rapport à l’année précédente en ce qui concerne les indicateurs de confiance dans la mise en œuvre de ces engagements, tels que le statut légal et la qualité des plans de mise en œuvre. L’écart entre les émissions prévues et celles nécessaires pour limiter le réchauffement à 1,5 °C ou 2 °C est considérable. Pour 2030, il faudrait donc réduire les émissions de 22 GtCO₂e pour atteindre un seuil de 50 % de probabilité de rester sous 1,5 °C, et de 14 GtCO₂e pour 2 °C. Si aucune mesure significative n’est adoptée, cet écart pourrait atteindre 29 GtCO₂e en 2035.
L’Emissions Gap Report exhorte les membres du G20, responsables d’une part importante des émissions mondiales, à intensifier leurs efforts. Ainsi, pour se conformer à l’objectif de 1,5 °C, il est estimé que les investissements doivent être multipliés par six, représentant entre 0,9 et 2,1 trillions de dollars par an jusqu’en 2050, avec un accent particulier sur le financement des économies en développement. Les énergies solaires et éoliennes pourraient contribuer à 27 % des réductions nécessaires d’ici 2030 et à 38 % d’ici 2035, tandis que les initiatives de reforestation et de gestion des forêts pourraient couvrir 20 % du potentiel de réduction des émissions. Pour atteindre ces objectifs, les pays doivent non seulement renforcer leurs politiques, mais aussi obtenir un soutien accru pour le financement international et favoriser les partenariats public-privé.
Nina Sag
United Nations Environment Programme, « Emissions Gap Report 2024: No more hot air … please! With a massive gap between rhetoric and reality, countries draft new climate commitments », 2024
Cet article se veut être un résumé concis de ce rapport